Live Report MOTOCULTOR Open Air 2023

La quatorzième édition du Motocultor Festival qui se déroula du 17 au 20 août 2023 fut celle du changement. Ainsi, outre le fait que l’événement s’étale désormais sur quatre jours, le site emblématique de Kerboulard à Saint-Nolff a été abandonné au profit de celui de Carhaix, dans le Finistère, déjà bien connu pour accueillir depuis longtemps les Vieilles Charrues. Il n’en fallait pas plus pour éveiller ma curiosité, non sans une certaine appréhension surtout quand on connaît les quelques soucis d’organisation qui ont affectés les éditions précédentes.

Dès l’arrivée, j’ai été confrontés à un « problème » de parking PMR/PSH, enfin ce qui a été défini comme tel, quelques places sur le bord de la route, à une belle distance du festival, le parking camion était un peu plus proche.

Seconde contradiction, la remise des accréditations « photo ». Il fallut ainsi faire la queue sur la partie gauche de l’ensemble des files d’attente puis, une fois en possession de notre sacro-sainte accréditation, couper à travers la foule massée devant l’entrée pour pénétrer sur le site via la dernière voie sur la droite. Mais pourquoi donc ne pas avoir réservé la première file de gauche, juxtaposée au bureau de remise des pass vip et PMR, à l’entrée des personnes accréditées ? Cela aurait fluidifié l’entrée des festivaliers, d’autant que l’incontournable fouille, indispensable pour d’évidentes raisons de sécurité, bien qu’elle fût parfois un peu succincte (les PMR/PSH sont moins fouillés). J’entendis ainsi quelques festivaliers se plaindre de cette inertie car, bien qu’ils soient présents devant l’entrée dès l’ouverture des portes, manquèrent les premiers concerts.

Parmi les autres désagréments constatés, notons le manque de tables pour se restaurer, la signalétique austère (quand elle n’était pas cachée tout simplement), bon nombre de festivaliers ont eu du mal à retrouver leurs chemin le jeudi soir. Dans l’enceinte du festival (absence du nom des scènes), ainsi que le faible nombre d’urinoirs ou de point d’eau (1 seul et unique pour le festival, situé à côté du bar de la Dave Mustage), l’absence de café (sauf à l’espace VIP). Enfin, dernier gros point négatif et non des moindres si nous nous référons aux différents avis exprimés autour de nous : « l’obligation » de consommer de la « 8,6 » dès lors que l’on désirait boire une bière. Répétons-le, ce « breuvage » n’a nullement la faveur des « metalleux » qui lui attribuent divers surnoms peu flatteurs.

Fort heureusement, le festival présenta de nombreux aspects positifs. Ainsi, la circulation au sein du site s’avéra globalement très fluide. Parallèlement, les nombreux stands et autres foodtrucks offrirent un choix conséquent pour se restaurer et se poser dans l’un des coins ombragés bordés d’arbres du site. L’espace V.I.P. était placé trop loin, donc pas moyen d’y aller pour moi. Toutes ces qualités, associées à une programmation des plus attirantes, firent du Motocultor 2023 un très grand succès : 54 000 festivaliers répondirent présents, dont 13 000, rien que le premier jour, s’agglutinèrent devant les quatre scènes. Le pari de déménager à Carhaix, même s’il sembla de prime abord risqué, est donc bien gagné, d’autant que si l’événement continue sur cette belle lancée, nul doute qu’il prendra de l’ampleur dans les prochaines années.

Durant ces quatre jours d’allégresse musicale collective, je couvrais ainsi 45 concerts. Entre de belles découvertes, certains d’entre eux furent mémorables alors que d’autres se montrèrent décevants. Me voici donc en route pour mon long périple musical Carhaisien…


Jeudi 17 août

Je débutais cette première journée par le concert de Grade 2, groupe anglais de Ryde sur l’île de Wight. Leur musique est décrite comme un son punk classique et contient des paroles sur les problèmes quotidiens.

Un rapide passage sous Massey Ferguscène pour voir Lost in Kiev, un groupe de post-rock français créé en 2007, originaire de Paris.

J’enchaînais ensuite avec Warbringer, groupe de thrash metal californien qui délivra une excellente énergie scénique et entraîna les premiers circle pits du jour.

Il me faut maintenant aller à l’autre extrémité sur la Dave Mustage, pour voir les suissesses de Burning Witches,

Il s’ensuivit un bref passage dans le pit photo durant le concert donné par A.A Williams (post-rock gothique intéressant sans être renversant)

avant de nous précipiter devant Ugly Kid Joe, que je n’avais pas vu quand ils sont Passés il y a déjà quelques années au Hellfest, quel bonheur ce fut de les voir sur scène, Whitfield Crane et sa bande de joyeux drilles qui s’en donnèrent à cœur joie.

Fort de ces belles émotions, je me dirigeai alors vers la Supositor Stage où, en toute innocence, je ne nous m’attendais pas à prendre la « déculottée » de la journée via le set monstrueux d’Angelus Apatrida : du bon gros thrash espagnol servi par des musiciens survoltés : tout simplement du bonheur à l’état pur !

C’est donc encore sous le choc de cette magnifique découverte musicale et scénique que je traversai le site pour suivre Wolfmother qui joua sur la Dave Mustage : changement d’ambiance radical donc, puisque la musique de ces australiens oscille entre hard rock et stoner, ponctuée de quelques variations empruntées au rock psychédélique et au heavy metal. J’ai moyennement apprécié ce concert, malgré qu’il fût servi par des éclairages scéniques de très belle facture, ce qui ne fut pas toujours le cas durant le festival.

ainsi que nous le verrons plus loin.

Sans transition, je continuai mon parcours musical par le concert de Coroner (thrash metal helvétique), attrayant sans être toutefois renversant, mais, c’est un bon groupe quand même et, ça rappelle de bons vieux souvenirs à les entendre.

Je retrouvai ensuite Hatebreed, groupe américain de metal hardcore, originaire de Bridgeport, dans le Connecticut. Le groupe est formé en novembre 1994 par Jamey Jasta, Dave Russo, Larry Dwyer et Chris Beattie.

Je terminai la journée en douceur par le set d’Extinction AD, groupe de thrash metal / crossover américain formé en 2013 et actuellement composé de : Pieter Van Den Berg (basse / ex-This Is Hell), Mike Sciulara (batterie / This Is Hell), Rick Jimenez (chant, guitare / This Is Hell, ex-Soldiers) et Ian Cimaglia (guitare). 

Idéal pour conclure en beauté ce jeudi.

Vendredi 18 août

Je commençai ce deuxième jour de Motocultor à la bourre, j’arrive presque à la fin du set de Boisson Divine. Leur style est un mélange un peu improbable de tout ce que les musiciens affectionnent : Une base Heavy/Power Metal, l’énergie du Punk-Rock, les instruments traditionnels de leur région, la polyphonie pyrénéenne et tout cela, chanté majoritairement en langue Gasconne.

Une base Heavy/Power Metal, l’énergie du Punk-Rock, les instruments traditionnels de leur région, la polyphonie pyrénéenne et tout cela, chanté majoritairement en langue Gasconne.

Je passai juste à côté pour voir Carthagods, l’un des premiers groupes de metal fondé en Tunisie à la fin des années 1990,

sans aucun doute parmi les pionniers du heavy metal dans leur pays d’origine et aujourd’hui le plus ancien de Tunisie qui nous offrit un bon concert servi par un bon jeu de scène dynamique.

Quant au concert de Deluge, groupe de Black Metal / Post-Hardcore fondé à Metz qui suivit sur la Suppositor Stage, je n’en garderai pas un souvenir impérissable.

En revanche, le set de Arka’n Asrafokor metal fusion composé de cinq musiciens pleins d’audace, est une incarnation unique d’un son extrême ouest-africain, ancré dans les cultures rythmiques régionales (Gazo, Blekete, etc…), musicalement étrange et intéressant à la fois.

A contrario, j’ai moyennement apprécié le concert de Hypno5e metal expérimental français, originaire de Montpellier. Certes bon mais très particulier dans ce qu’ils font musicalement.

Je me dirigeai alors vers la Dave Mustage pour voir ce que donnai Isomnium groupe de death metal mélodique finlandais, originaire de Joensuu pour continuer la journée devant. La dernière fois qu’ils étaient passés, la scène était presque noire, mais bon cette fois il fait encore jour et visuellement c’est mieux. Le concert était, ma foi, pas si mal.

Afin de continuer dans le « mode découverte », direction Massey Freguscène pour Terror,

formation punk hardcore américain, originaire de Los Angeles, en Californie qui donna un concert endiablé et appréciable.

Un petit détour devant le concert de Luc Arbogast musicien et chanteur français, qui s’inspire de la musique médiévale,

bien que l’attente fût longue, ce qu’il fait n’est pas franchement mauvais, mais un peu monotone. Cela dit, il a une amplitude vocale très surprenante.

C’est au tour du concert de Napalm Death. Barney et sa bande règnent en maître dans le doux royaume du grindcore et, sous la pluie !

L’anecdote est d’autant plus amusante que force est d’admettre que les conditions météorologiques furent exceptionnellement clémentes durant tout le festival et qu’il s’agit donc là d’une des rares averses subies. Je passai donc sur la Bruce Dicking scène pour aller voir Uuhai,

qui allie brillamment Metal/Rock et chant de gorge traditionnel mongol. Ce fut une très belle surprise

Je craignais que ce soit comme The Hu qui sont passés au HellFest de cette année, mais non, c’est plus énergique tout de même. Le concert de Deicide qui fut bien évidemment excellent !

Je changeai ensuite radicalement d’ambiance avec Wardruna qui se produisit sur la Dave Mustage.

Leur indéniable travail scénique fut grandement affecté par des éclairages de scène bien trop ponctuels et durs. Ce fut notre déception de la journée. Je conclus mon parcours du jour avec Marduk,

, toujours aussi bon sur scène : un vrai régal ! bien que vu au Muscadeath dans une petite salle à Vallet en 2022, les voir au Motocultor est tout simplement Géant !!

Samedi 19 août

Alors que la fatigue accumulée lors des deux premiers jours commence à se faire ressentir, j’entamai cette avant-dernière journée par le concert de Sylvaine,

musicienne norvégienne, seul membre permanent du « line-up », qui œuvre dans un créneau mixant post-rock et heavy metal. Le second concert de la journée fut un vrai plaisir : T. T. T. (Tribute To Thrash),

entité tentaculaire réunissant Stéphane Buriez (Loudblast), d’Alex Colin-Tocquaine (Agressor), Nicklaus Bergen (Altered Beast) et Fabien Cortana (Evil One) nous offrit, en effet, une prestation fort sympathique en jouant des reprises connues et emblématiques du thrash, et toucha d’emblée le public. Après leur set, les musiciens donnèrent même leurs instruments à quelques festivaliers chanceux. C’est donc remonté à bloc que je continuai par le concert de Fuoco Fatuo qui mêle habilement doom et death metal à travers un jeu de scène et un décorum assez tribal et chamanique (crânes d’animaux, maquillages noirs et autres artifices propres au genre) : une découverte intéressante.

C’est toutefois devant la Dave Mustage que je pris ma première claque du jour, par le concert de Coilguns, quatuor suisse qui s’illustre dans le post-hardcore, mené d’une main de maître par son chanteur Louis Jucker, véritable alien scénique qui, une fois le concert commencé, s’approprie la scène en la parcourant dans tous les sens, grimpant même où bon lui semble : une énorme bouffée d’énergie qui englobe instantanément le public.

Ainsi préparés, nous traversâmes le site pour aller voir Akiavel sur la Supositor Stage. Ce fut « la » merveille de la journée, et sans aucun doute l’un des meilleurs concerts de cette édition du Motocultor. Les compères originaires de la région PACA, jouèrent un death metal explosif dont l’intensité fut galvanisée par la chanteuse Auré, possédée par son jeu de scène théâtral et teinté d’une autodérision certaine. Bien que vu au Hellfest cette année, avec un son exécrable, le Motocultor leur a offert un très bon son. Ce fut un énorme moment !

Maintenant direction Dave Mustage pour voir Bleed From Within est un groupe de deathcore mélodique originaire de Glasgow en Écosse. Moi qui habituellement déteste ce genre musical, sauf rares exception, ce fut le cas, belle surprise en particulier, avec en plus d’être plus qu’énergique, le groupe à une bonne présence sur scène.

Je pris la direction de la Massey Ferguscène afin de couvrir le concert de Sortilège. Le chanteur, trouva d’emblée son public et donna une belle prestation (malgré une qualité sonore assez mauvaise et sans doute indépendante de leur volonté), jouant notamment de nombreux titres du dernier album. Ce qui m’a fortement surpris c’est la jeunesse du public qui connaissait fort bien le vieux groupe des années 80.

Je passai ensuite à côté sur la Bruce Dickingscène voir Dog Eat Dog, un groupe de punk hardcore américain, originaire du comté de Bergen, dans le New Jersey, là ce n’est définitivement pas ma tasse de thé.

Je cheminai ensuite jusqu’à la Massey Ferguscène afin d’y voir Russian Circles qui ne m’enthousiasma guère mais il est vrai que je suis assez peu sensible aux concerts instrumentaux.

Ces petits désagréments passés, la joie revint instantanément avec Sodom, qui assura une prestation de haute volée, servie par des jeux de lumière de grande qualité.

Je terminai la journée via le set de Watain, tout simplement excellent, comme d’habitude. Leur show est basé sur leur dernier opus « The Agony & Ecstasy Of Watain » qui est probablement le meilleur album de l’année et du groupe. Aucun photographe n’a été sacrifié, ni baptisé au sang pendant le show. Bien que comme d’habitude avec Watain, il ne faut pas trop espérer avoir autre chose que du rouge en éclairage et beaucoup de fumée. Peu de temps à passer dans le pit photo vu le nombre de photographes présent. Ce fut sportif, mais on fait ce qu’on peut. Très bon concert à revoir sur scène.

Dimanche 20 août

Parvenu sur le site un peu plus tard qu’initialement prévu, j’ouvrai cette dernière journée par l’excellent concert de Gaerea, du Black Metal originaire de Porto au Portugal et fondé en 2016. On ne connait pas l’identité des musiciens, ceux-ci étant cagoulés un peu à la manière de MGLA.

Avec Church of Misery, originaire de Tokyo, un Doom metal japonais nous est servi : pas désagréable à entendre. Mais, là encore, la scène était très enfumée et l’éclairage très médiocre. Ce qui complique un peu la tâche.

Je pris la direction de Dave Mustage pour voir Shadow of Intent est un groupe de deathcore américain du Connecticut. Ils se sont formés en 2013 en tant que projet de studio sur le thème de Halo par Ben Duerr et Chris Wiseman. Le nom du groupe fait référence à un vaisseau Covenant de la série Halo. Comme précédemment avec le deathcore et moi-même, j’ai trouvé le concert plutôt intéressant et assez rythmés, avec des passages un peu lents et d’autres beaucoup plus rapide, pour finir c’est une bonne surprise.

Une petite pause s’impose avant d’aller voir Moonreich, groupe de black metal qui a remplacé 1914, (qui n’ont pu sortir de leur pays).

Ils nous ont servi leur black metal avant d’enchaîner avec le doom plutôt convaincant des Italiens de Messa, même si encore une fois il y avait beaucoup trop de fumée.

Juste après, je prolongeai mon périple avec Archspire et leur death metal technique. Les Canadiens, originaires de Vancouver, en Colombie-Britannique ont assuré sur scène. Bien que le chanteur Oli Aleron bouge énormément sur scène et ne reste que très peu de temps à la même place ce qui augmente la difficulté pour le photographe que je suis.

Je poursuis le voyage musical en terre Carhaisienne avec Crowbar, dont le sludge est lourd et pesant. Les Américains, originaires de La Nouvelle-Orléans submergèrent le public.

Je poursuivi mon périple avec Dieth : La réunion de trois musiciens en quête de revanche : le bassiste David Ellefson, le batteur Michal Lysejko issu de Decapited et le chanteur guitariste suédois Guilherme Miranda ancien membre d’Entombed A.D. avaient tous hâte de refaire de la musique.

La fatigue se fait de plus en plus ressentir avec le 43-ème concert, je me prépare donc pour les Dying Fetus, groupe que j’avais découvert pendant le troisième Furyfest (2004), et vu en 2022 au Hellfest. Ils nous ont encore fourni un bon gros death metal à la sauce américaine. Très bon concert.

Je termine par Eyehategod, parfois abrégé et crédité sous les initiales EHG, groupe de sludge metal américain, originaire de La Nouvelle-Orléans, en Louisiane. Il est un des groupes pionniers de cette scène. La surpopulation de photographes dans le pit, plus un éclairage un peu merdique, me force à abandonner la partie au bout du 45-ème concert.

Finalement, ces quatre jours passés au Motocultor, illustrés par de nombreux et grands moments de bonheur, et malgré quelques petites déceptions, insignifiantes. Le ressenti positif global sur l’événement, prouvent que ce festival a désormais franchi un cap, d’autant que le vaste site de Carhaix constituera un atout à ses ambitions. Ainsi, s’il continue sur cette lancée, et malgré ses quelques petits défauts d’organisation, il y a fort à parier que le Motocultor grandira un peu plus chaque année. Que pourrions-nous lui souhaiter de mieux ?